clause de non-concurrence et liberté d'entreprendre

Clause de non-concurrence et liberté d’entreprendre : quel équilibre ?

La clause de non-concurrence reste un outil essentiel pour préserver votre entreprise du comportement déloyal de vos collaborateurs. Elle vise à protéger vos intérêts légitimes en interdisant à vos collaborateurs d’exploiter vos informations stratégiques ou votre savoir-faire pour vous concurrencer. Mais cette disposition contractuelle peut se heurter au principe de la liberté d’entreprendre. Cette dernière garantit à chacun le droit d’exercer une activité professionnelle de son choix. Une clause mal calibrée peut se retourner contre vous. 

Alors, comment sécuriser votre business sans freiner cette liberté économique ? Comment encadrer vos collaborateurs, vos salariés ou vos freelances, sans porter atteinte à leur droit de développer leur propre activité ? Découvrez avec Infolawyers les solutions pour trouver le juste équilibre entre clause de non-concurrence et liberté d’entreprendre.


L’essentiel à retenir

  • La clause de non-concurrence est une disposition contractuelle qui s’applique après la rupture d’un contrat de travail ou de prestations. Elle interdit à un ancien salarié ou un freelance d’exercer une activité concurrente, pour son propre compte ou pour celui d’un autre employeur.
  • Sa validité est strictement encadrée afin de préserver l’équilibre entre protection de l’entreprise et liberté d’entreprendre.
  • Une clause de non-concurrence n’est valable que si elle protège un intérêt légitime de l’employeur et comporte une contrepartie financière réelle. 
  • Elle doit également être limitée dans le temps et dans l’espace.
  • Elle doit enfin être proportionnelle. 
  • En cas de clause abusive, le salarié ou le freelance reste libre d’entreprendre et peut obtenir réparation.

Clause de non-concurrence et liberté d’entreprendre : deux principes à concilier

Il est important, avant toute chose, de comprendre ce qu’est la clause de non-concurrence et la liberté d’entreprendre. Ces deux notions poursuivent des objectifs légitimes, mais parfois opposés : protéger votre entreprise d’un côté, laisser chacun développer son activité de l’autre.

Définition de la clause de non-concurrence

Une clause de non-concurrence protège votre entreprise contre la concurrence déloyale d’un ancien salarié ou d’un prestataire. 

Cette disposition ne doit pas être confondue avec l’obligation de loyauté du salarié, qui ne s’applique que pendant la relation contractuelle. La clause de non-concurrence produit, quant à elle, ses effets après la rupture du contrat de freelance ou de travail (dans les limites que nous verrons plus loin).

La Cour de cassation a souvent été amenée à se prononcer sur la validité de ces clauses. Elle rappelle régulièrement qu’une clause de non-concurrence ne peut avoir pour objet que la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, rien de plus.


Autrement dit, elle ne peut pas devenir une arme notamment pour verrouiller la liberté d’entreprendre. C’est ce fragile équilibre que les juges doivent veiller à préserver.

La liberté d’entreprendre, un droit fondamental

La liberté d’entreprendre consacre le droit pour chacun de créer, gérer et développer une activité économique librement.

Elle permet à un ancien salarié de lancer son entreprise ou à un freelance de poursuivre son activité en toute indépendance, sans être limité par les clauses de ses anciens contrats.

Ce principe est au cœur de notre économie de marché. Il favorise la circulation des talents, stimule l’innovation et soutient la croissance. Mais cette liberté atteint ses limites lorsque son exercice implique une concurrence déloyale et un détournement de clientèle.

Tout est donc une question d’équilibre. Comment protéger ce que vous avez construit sans empêcher un ancien collaborateur de se réinventer ? Comment sécuriser vos contrats sans franchir la limite d’une restriction abusive ? C’est précisément sur cette ligne de crête que se joue la validité d’une clause de non-concurrence.

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Les conditions de validité d’une clause de non-concurrence : quatre garde-fous essentiels pour préserver la liberté d’entreprendre

Pour être valable, une clause de non-concurrence doit respecter plusieurs conditions strictes. Ces garde-fous, définis par la Cour de cassation, visent à garantir un équilibre entre la protection légitime de votre entreprise et le droit fondamental de chacun à entreprendre. 

Protéger un intérêt légitime de l’entreprise

Comme nous l’avons vu, la clause de non-concurrence doit répondre à un besoin réel, propre à l’activité exercée ou au poste concerné. Rappelons que, selon la Cour de cassation, une clause n’est valable que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise (Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45.135). Autrement dit, elle doit servir une finalité économique concrète.

Être limitée dans le temps et dans l’espace

Vous ne devez jamais insérer une clause de non concurrence totale, c’est-à-dire illimité dans le temps et applicable partout. 

La durée de votre clause doit donc être raisonnable. Dans la plupart des cas, une durée allant de 6 mois à 2 ans est acceptable, selon le poste et la sensibilité des informations détenues.

De la même manière, la zone géographique doit rester cohérente avec votre marché. Interdire à un salarié d’entreprendre partout “en France” ou “dans le monde” n’a aucun sens si votre clientèle se limite à une seule région par exemple. Une clause trop vaste est presque toujours déclarée nulle par les tribunaux.

Par conséquent, si vous employez un commercial dans votre PME bretonne, vous ne pouvez pas l’empêcher de créer une entreprise similaire à la vôtre à Lyon pendant 10 ans. Une telle restriction sera jugée excessive par les tribunaux.

La Cour de cassation a d’ailleurs rappelé, dans un arrêt du 15 janvier 2014 (n° 12-23.340), qu’une clause valable doit tenir compte de la réalité économique de l’entreprise et de son rayonnement territorial.

Prévoir une contrepartie financière réelle

C’est la condition la plus connue, mais aussi la plus souvent négligée. Sans contrepartie financière, la clause est automatiquement nulle, même si elle protège un intérêt légitime.

Cette indemnité vise, en effet, à compenser la restriction de liberté imposée au salarié ou au freelance. Elle reconnaît que, pendant la période d’interdiction, la personne concernée ne peut pas exploiter pleinement ses compétences.

Le montant proposé doit, par ailleurs, être sérieux et proportionné. Vous éviterez donc le fameux euros symbolique. Une telle somme sera toujours considérée comme une absence de contrepartie (Cass. soc., 7 juill. 1998, n° 96-44.191).

En pratique, l’indemnité est très souvent versée chaque mois après la rupture du contrat.  

Bon à savoir : certaines conventions collectives fixent un taux minimal (souvent autour de 30 % du salaire brut moyen des douze derniers mois). Vérifiez les textes applicables à votre secteur d’activité et à votre entreprise avant de rédiger votre clause de non-concurrence. 

Ne pas priver la personne concernée de toute activité professionnelle

Une clause de non-concurrence protège votre entreprise, mais ne peut en aucun cas retirer à une personne la possibilité de travailler. Les juges apprécient ici sa proportionnalité. Dans un arrêt du 13 janvier 2021 (n° 19-20.635), la Cour de cassation a ainsi rappelé que la clause ne peut avoir pour effet d’interdire au salarié d’exercer un emploi conforme à sa formation et à son expérience. Dans le cas contraire, la clause est déclarée nulle. 

Il faut garder en tête que l’objectif d’une telle clause n’est pas d’écarter toute concurrence, mais seulement d’éviter la concurrence déloyale, sans pour autant bloquer les reconversions professionnelles ou la création d’activité.

Que risque-t-on en cas de non-respect des critères de validité d’une clause de non-concurrence ? 

Beaucoup d’entrepreneurs pensent qu’une clause “mal rédigée” reste dissuasive, et qu’au pire, elle n’aura aucun effet concret. C’est une erreur fréquente et coûteuse. Car en réalité, si une clause de non-concurrence non conforme ne vaut rien sur le plan juridique, elle peut se retourner contre celui qu’elle était censée protéger.

Lorsqu’une clause de non-concurrence ne respecte pas les conditions posées par la jurisprudence, elle est nulle et sans effet. Autrement dit, elle ne peut pas être opposée à l’ancien salarié ou au prestataire. Celui-ci retrouve alors toute liberté d’exercer une activité concurrente, sans que l’entreprise puisse lui reprocher une violation contractuelle. Mais les conséquences ne s’arrêtent pas là.

Aucune protection pour l’entreprise

Une clause nulle équivaut à une absence de clause. Si un ancien collaborateur utilise son savoir-faire ou reprend une partie de la clientèle, vous ne pourrez pas invoquer la faute contractuelle pour agir contre lui. Il faudra alors agir sur le terrain plus incertain de la concurrence déloyale, beaucoup plus difficile à prouver.

Un risque de condamnation financière

Si la clause déclarée nulle prévoyait une contrepartie financière que vous avez déjà versée, le salarié ou le freelance peut conserver les sommes perçues. Ces dernières ne sont pas remboursables (Cass. soc., 27 mars 2019, n° 17-28.767).

Et si la clause est illicite et empêche la personne de travailler, celle-ci peut demander des dommages et intérêts pour la période pendant laquelle elle a été empêchée d’exercer son activité.


Par exemple, un consultant soumis à une clause de non-concurrence trop large (interdiction “dans tout le domaine du digital”) renonce à plusieurs contrats. S’il prouve que cette restriction lui a fait perdre des revenus, il peut obtenir réparation. Son montant peut être supérieur à celui de l’indemnité versée dans le cadre de la clause de non-concurrence.

Une atteinte à votre crédibilité et votre réputation

Enfin, une clause nulle fragilise l’ensemble de votre contrat. Elle peut être perçue comme une tentative de déséquilibre ou d’abus, notamment si elle visait à dissuader plutôt qu’à protéger. En cas de litige, cela peut peser dans l’appréciation globale du contrat par le juge.

Plus largement, vous fragilisez la crédibilité et la confiance que vous inspirez à vos salariés et vos prestataires.

Le meilleur réflexe reste donc de faire relire ou rédiger vos contrats par un avocat. Mais au-delà d’une simple disposition contractuelle, c’est toute la stratégie juridique de votre entreprise qui mérite d’être sécurisée.

Avec le Bouclier 360, Infolawyers vous offre un accompagnement complet pour protéger, structurer et développer votre activité. Vous bénéficiez de l’expertise d’avocats expérimentés, d’une hotline juridique prioritaire, de modèles exclusifs et d’un réseau d’entrepreneurs pour avancer en toute sérénité. Une solution conçue pour vous faire gagner du temps, de l’argent et de la tranquillité d’esprit, tout en vous garantissant votre protection juridique.

FAQ : clause de non-concurrence et liberté d’entreprendre

Une clause de non-concurrence peut-elle interdire à un salarié de créer son entreprise ?

Oui, si elle vise le même secteur et la même zone que votre employeur. Mais elle doit être limitée dans le temps et compensée financièrement.

Que se passe-t-il si une clause de non concurrence ne prévoit pas de contrepartie financière ?

Elle est automatiquement nulle et inapplicable. Vous êtes alors libre d’exercer une activité concurrente, et si cette clause vous a causé un préjudice (perte de revenus, impossibilité de travailler), vous pouvez demander des dommages et intérêts.

Une entreprise peut-elle renoncer à la clause de non-concurrence après le départ d’un collaborateur ?

Oui, à condition de respecter la procédure prévue au contrat. Si la renonciation intervient trop tard, l’entreprise reste tenue de verser la contrepartie financière pendant toute la durée d’application de la clause.

Puis-je inclure une clause de non-concurrence dans un contrat de prestation ou avec un freelance ?

Oui, c’est possible, mais elle doit, là encore, protéger un intérêt légitime et respecter les conditions de validité (durée, zone géographique et indemnité réelle). Une clause trop large ou sans contrepartie risque d’être annulée en cas de litige.

Que faire si un ancien collaborateur ne respecte pas sa clause de non-concurrence ?

Avant d’agir, vérifiez la validité de la clause. Si elle est conforme (proportionnée et indemnisée), vous pouvez mettre en demeure la personne concernée, voire engager une action en justice pour obtenir réparation du préjudice subi. En revanche, si la clause est déséquilibrée ou incomplète, elle ne sera pas opposable. Pour des conseils personnalisés, faites appel à un avocat. 

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