Plus de la moitié des consommateurs européens déclarent retourner les produits achetés sur Internet dont ils ne sont pas satisfaits. Un chiffre vertigineux qui a poussé le législateur à encadrer la procédure de rétraction de la vente en ligne. Pour les e-commerçants, l’enjeu est double : se conformer scrupuleusement à la législation qui comporte de vrais risques, tout en instaurant un processus de retour fluide et compréhensible. Objectifs ? Renforcer la confiance de vos clients et vous protéger contre la mauvaise foi de certains d’entre eux, tentés de retourner vos produits après les avoir “consommés”. Découvrez avec le Guide rédigé par Infolawyers, les erreurs à ne pas commettre et les bonnes pratiques à mettre en place.
Qu’est-ce que le droit de rétraction de la vente en ligne ?
Droit de rétractation de la vente en ligne : que dit la loi ?
Le droit de rétractation autorise le consommateur ayant acheté un produit ou un service en ligne à changer d’avis. En clair, il dispose d’un délai pour renvoyer son achat et obtenir un remboursement.
En vertu de l’article L221-1 du code de la consommation, ce droit s’applique à tous les achats réalisés en l’absence d’une interaction physique entre les deux parties. Typiquement, il s’agit donc des ventes par Internet ou par téléphone.
Article L221-1 : « tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat. »
Par ailleurs, l’achat doit avoir été effectué par un « consommateur » auprès d’un professionnel. Revenons rapidement sur ces deux notions clés.
- Le consommateur se définit comme une personne physique agissant pour satisfaire ses besoins personnels, en dehors de toute activité professionnelle.
- Le professionnel est, quant à lui, une personne physique ou morale, agissant dans le cadre de ses activités commerciales, industrielles, artisanales, etc.
Il n’existe donc pas de droit de rétractation sur une plateforme de vente entre particuliers, à moins que cette transaction relève, en réalité, d’une activité commerciale.
Bon à savoir : la résiliation des abonnements
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Les exceptions au droit de rétraction de la vente en ligne
Beaucoup de sites e-commerce affichent une liste de produits ne pouvant pas faire l’objet d’un retour. Mais peuvent-ils vraiment décider seuls de ces exceptions au droit de rétractation ?
Absolument, pas. L’article L221-28 du Code de la consommation limite de façon stricte les produits et services non soumis à cette obligation. Il s’agit notamment :
- Des services (une consultation, par exemple) réalisés en totalité ou en partie avant l’expiration du délai de rétractation, avec l’accord préalable et exprès du consommateur (en clair une case à cocher dans le formulaire de vente ou une demande par email) ;
- Des contenus numériques sans support matériel (des formations, par exemple) dont l’exécution a commencé pendant le délai de rétractation : l’accord exprès et préalable du consommateur est indispensable. Il doit renoncer à son droit de rétractation en toute connaissance de cause. (Là encore une case à cocher dans le formulaire de vente ou une demande par email est nécessaire) ;
- Des biens et des services dont le prix dépend de la fluctuation du marché ;
- Des biens réalisés sur mesure et dont la personnalisation impacte la nature ou la destination du produit (exemple des produits de couture sur mesure ou du “print on demand”) ;
- Des produits susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement (c’est notamment le cas des produits alimentaires) ;
- Des produits d’hygiène et de santé ouverts par le consommateur ;
- Des enregistrements audio et vidéo, mais également des logiciels informatiques descellés par le consommateur après la livraison ;
- Des produits mélangés par le client et désormais indissociables ;
- Des journaux, périodiques ou magazines hors abonnement ;
- De prestations de services d’hébergement autres que d’hébergement résidentiel : il peut s’agir de services de location de vacances Airbnb ou Abritel, de services de transport de biens, de locations de voitures, de restauration ou d’activités de loisirs qui doivent être fournis à une date ou à une période déterminée (exemple : un stage de danse ou une retraite de Yoga).
Comment mettre en place le droit de rétraction sur votre boutique en ligne?
1ère étape : informer les consommateurs
❌ L’erreur à ne pas commettre : garder le silence…
Conformément à l’article L221-5, 7° du Code de la consommation, votre client doit être informé de son droit de rétractation et de ses modalités d’exercice (délai, procédure à suivre, formulaire à utiliser, etc.) avant la conclusion du contrat.
Nous vous conseillons de mentionner ces informations dans vos conditions générales de vente. Rappelons que ces dernières doivent être lues et approuvées par le consommateur avant la validation de son achat.
2e étape : proposer un formulaire de retour type
❌ L’erreur à ne pas commettre : “Pour exercer votre droit de rétractation, contactez-nous par email”.
Depuis le 28 mai 2022, informer les consommateurs de leur droit n’est plus suffisant. Il convient également de mettre à leur disposition un formulaire type pour l’exercer. Son contenu est d’ailleurs défini de manière stricte par l’annexe à l’article R221-1 du Code de la consommation. Vous devez notamment y mentionner l’adresse email de votre entreprise.
Voici le modèle proposé par le Code de la consommation :
À l’attention de [nom, adresse et email de votre entreprise]
Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :
Commandé le (*)/reçu le (*) :
Nom du (des) consommateur(s) :
Adresse du (des) consommateur(s) :
Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :
Date :
(*) Rayez la mention inutile.
Vous pouvez proposer un formulaire téléchargeable et imprimable afin que le consommateur puisse vous le renvoyer par courrier ou par email. Vous pouvez également prévoir la possibilité de le remplir et de l’envoyer en ligne.
Attention, si vous êtes dans l’obligation de mettre ce formulaire à disposition de votre client, ce dernier n’est pas obligé de l’utiliser. Toute déclaration dénuée d’ambiguïté, exprimant clairement sa volonté de se rétracter, est valable. Elle peut donc être formulée par email, ou encore, par téléphone.
3e étape : respecter le délai de rétractation des consommateurs
❌ L’erreur à ne pas commettre : “Si le produit commandé ne vous convient pas, vous disposez d’un délai de 48 heures à compter de la réception de votre commande pour nous signaler votre rétractation”.
Le délai indiqué dans cette clause n’est pas conforme à l’article L221-18 du Code de la consommation. Ce dernier accorde au consommateur 14 jours pour se rétracter. En matière de prestations de service (consultations, contenus de formation, service à distance, SaaS, etc.), le point de départ est le lendemain de la vente. En matière de produits physiques (e-commerce, objets, bien divers, etc.), le point de départ est le lendemain de la réception du produit commandé.
Deux précisions importantes :
- La commande en ligne inclut des produits, lots ou pièces dont la livraison est effectuée séparément : le délai de rétractation démarre à la réception par le consommateur du dernier élément.
- En cas de livraison répétée d’un même produit, le délai démarre à la réception du premier élément.
Enfin, n’oubliez pas d’accuser réception de la rétraction de votre client sur un support durable. Ne vous contentez pas d’un coup de téléphone. En cas de litige, vous ne serez pas en mesure de prouver le respect des délais légaux.
⚠️ Si vous faites de la vente en ligne et que vous n’avez pas appliqué une des formalités décrites aux étapes 1, 2 et 3, le délai de rétractation passe à 12 mois. Imaginez, vos clients peuvent demander le remboursement de votre prestation de service, de votre formation ou de vos produits jusqu’à un an après la vente. C’est la raison pour laquelle il faut appliquer avec rigueur les règles relatives au droit de rétractation. Une dernière précision : que se passe-t-il si vous remplissez vos obligations pendant cette période de prolongation ? Dans ce cas de figure, le délai de rétractation prolongé prendra fin quatorze jours après la réception par le consommateur de ces informations.
4e étape : respecter le délai légal de retour
❌ L’erreur à ne pas commettre : “En cas de rétractation, vous disposez d’un délai de 24 heures pour nous retourner votre produit”.
Vous ne pouvez pas prévoir une telle clause dans vos conditions générales de vente, ni appliquer une politique de retour aussi stricte. En effet, le consommateur dispose de 14 jours à compter du jour de sa déclaration de rétractation pour vous retourner le produit dont il n’est pas satisfait.
Résumé de la procédure : le consommateur dispose de 28 jours maximum pour retourner le produit (14 jours pour signaler son intention de se rétracter et 14 jours pour renvoyer la marchandise). Il est strictement interdit de raccourcir ces délais. En revanche, vous pouvez offrir plus de temps à vos clients pour changer d’avis.
5e étape : accepter les produits utilisés, sans emballage d’origine ou endommagés
❌ L’erreur à ne pas commettre : “Seuls les produits non utilisés, dans leur emballage d’origine, peuvent profiter d’un remboursement”.
Là encore, cette formulation est contraire à la loi. En vertu de l’article L221-23, al. 3 du Code de la consommation, les manipulations nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement des marchandises ne doivent pas empêcher l’exercice du droit de rétractation du consommateur. Seule une utilisation anormale du produit, ayant entraîné un dommage, pourrait lui être reprochée.
En clair, lors du retour, vous ne pouvez pas exiger de votre client :
- La présence de l’emballage d’origine ;
- Un produit en parfaite condition ;
- Un produit n’ayant jamais été utilisé.
Bon à savoir : autre erreur fréquente, mettre les frais de retour à la charge de l’acheteur, sans l’informer au préalable. Cette précision doit apparaître dans vos conditions générales. Par ailleurs, vous avez l’interdiction de lui facturer des frais de remise en état du bien ou tout autre frais du même genre.
6e étape : rembourser le consommateur dans le délai légal
❌ L’erreur à ne pas commettre “Le remboursement aura lieu dans les 60 jours suivants la date de réception du produit par notre site”.
Évidemment, ce délai de remboursement est beaucoup trop long. La loi vous impose, en effet, de rembourser votre client dans les 14 jours à compter de votre connaissance de son intention de se rétracter. Vous ne devez pas attendre de réceptionner le produit retourné. En cas de retard de remboursement, l’article L242-4 du Code de la consommation prévoit des pénalités.
Bon à savoir : vous devez lui rembourser le prix de la marchandise et les frais de livraison standard, payés au moment de la commande. Les frais liés à un mode de livraison plus rapide et plus onéreux restent, en revanche, à sa charge. Par ailleurs, vous devez proposer le même moyen de paiement pour le remboursement que celui utilisé pour l’achat. En clair, si le paiement a eu lieu en carte bleue, vous ne pouvez pas lui imposer un remboursement par chèque. Enfin, si le consommateur accepte un autre mode de remboursement, il ne doit subir aucuns frais.
Pour éviter tout litige avec vos clients, la clé est de rédiger des conditions générales de vente claires, précises et sans ambiguïté. Ces dernières constituent la pierre angulaire d’une relation client sereine et sécurisée. Pour ne laisser aucune place à l’oubli et assurer une protection optimale de vos transactions en ligne, appuyez-vous sur le savoir-faire et l’expertise Infolawyers. Souscrivez au Pack Documents Juridiques Obligatoires et lancez votre boutique en ligne sur des bases solides.