E-commerce et contrefaçon : risques pour les revendeurs

Contrefaçon et site e-commerce : quels risques juridiques pour les revendeurs ?

Créer son propre site e-commerce est aujourd’hui simple, rapide et accessible. Que vous vendiez des produits achetés en gros ou ceux proposés par d’autres vendeurs via votre site, vous êtes exposé à un risque juridique majeur : la contrefaçon. Et contrairement aux idées reçues, ce risque ne concerne pas que les grandes plateformes comme Amazon ou eBay. Un entrepreneur qui vend ou laisse vendre des produits contrefaits sur son site engage pleinement sa responsabilité, avec des conséquences civiles, pénales, et commerciales qui peuvent être lourdes. Infolawyers fait le point.

Qu’est-ce que la contrefaçon dans l’e-commerce ?

En droit français, la contrefaçon est définie par l’article L.335-2 du Code de la propriété intellectuelle, qui réprime “toute reproduction, imitation ou exploitation d’une œuvre, d’une marque, d’un dessin, d’un modèle ou d’un brevet sans l’autorisation de son titulaire”. Il s’agit d’un délit passible de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende (cinq ans et 500 000 euros en cas de délit commis en bande organisée). 

Sur un site e-commerce, la contrefaçon se manifeste le plus souvent par la mise en ligne de produits portant des signes distinctifs protégés, sans accord du titulaire des droits : des t-shirts représentant un personnage sous licence, des sacs affichant un logo proche d’une marque de luxe, ou des reproductions graphiques d’œuvres d’art contemporaines. 

Peu importe que vous ne soyez pas à l’origine de la fabrication du produit. Dès lors que vous diffusez une telle offre à la vente sur votre site, vous pouvez engager votre responsabilité.

Ce type d’infraction peut, par ailleurs, s’accompagner, de faits connexes, tels que la publicité trompeuse (dans la mesure où le consommateur est induit en erreur sur la nature ou l’authenticité du produit), la concurrence déloyale, ou encore le dénigrement, lorsque la mauvaise qualité du produit contrefait porte atteinte à la réputation de la marque imitée.

E-commerçant : quand êtes-vous responsable en cas de contrefaçon ? 

La plupart du temps, si vous administrez un site e-commerce, vous n’agissez pas en simple hébergeur technique. Vous choisissez les produits à vendre, rédigez ou validez les fiches descriptives, sélectionnez les visuels, organisez les modalités de paiement, gérez les commandes ou les retours. Ce rôle actif vous place, juridiquement, dans la catégorie des éditeurs de contenu, au sens de l’article 6-I-2 de la Loi pour la Confiance dans l’Économie Numérique (LCEN).

La distinction entre hébergeur et éditeur est essentielle car elle détermine le régime de responsabilité applicable :

  • Un hébergeur est un prestataire technique. Il se limite à stocker des contenus pour le compte d’autrui, sans intervenir dans leur élaboration, leur sélection ou leur mise en forme. Tant qu’il reste passif, il bénéficie d’une responsabilité allégée. En clair, il n’est responsable que s’il ne retire pas, sans délai, un contenu manifestement illicite après une notification conforme.
  • Un éditeur, en revanche, exerce un contrôle actif sur les contenus publiés : il les crée, les sélectionne ou les organise. Il est alors pleinement responsable de leur légalité dès leur mise en ligne.

Dans le cadre d’un site e-commerce que vous administrez vous-même, vous êtes quasiment toujours considéré comme éditeur. Par exemple, si vous commercialisez des produits via votre propre interface, que vous choisissez les articles proposés, que vous décrivez vous-même leurs caractéristiques ou que vous encaissez les paiements, vous remplissez tous les critères de l’éditeur. À ce titre, vous êtes responsable de plein droit des contenus mis en ligne sur votre site, y compris en cas de contrefaçon.

À l’inverse, prenons le cas d’un prestataire technique qui héberge un site sur lequel des vendeurs tiers publient librement leurs offres, sans que l’hébergeur ne les modère, ne les sélectionne ou n’intervienne dans leur présentation. Tant que ce prestataire reste passif, il peut bénéficier du régime de l’hébergeur. Mais dès qu’il valide les annonces, optimise leur visibilité ou participe à la transaction (paiement, SAV, etc.), il endosse un rôle actif, et perd le bénéfice du régime protecteur. C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 1er juin 2022. Une plateforme qui intervient dans le parcours d’achat, la gestion des avis ou le service client bascule dans un rôle actif, et devient donc éditeur. 

Le 22 décembre 2022, LA CJUE est même allée plus loin dans l’affaire opposant Christian Louboutin à Amazon en tenant cette dernière responsable de la promotion et de la commercialisation de fausses chaussures Louboutin par des vendeurs tiers. En effet, « l’utilisateur normalement informé et raisonnablement attentif, a l’impression qu’Amazon commercialise elle-même, en son nom et pour son propre compte, les produits [contrefaits] ». 

Pour résumer, retenez qu’en tant qu’e-commerçant, vous êtes rarement dans une position de simple hébergeur. Vous ne pouvez donc pas vous exonérer de votre responsabilité en cas de vente de produits contrefaits sur votre site, même si vous ignoriez de bonne foi leur caractère illicite.

Le DSA : des obligations supplémentaires même pour les « petits » sites

Entré en vigueur en 2022, le Digital Services Act (DSA) vise à responsabiliser tous les acteurs de l’économie numérique, y compris les sites e-commerce. Il ne concerne pas uniquement les grandes plateformes. Des obligations peuvent s’appliquer à tout site, en fonction de sa nature et de son importance.

Autrement dit, même si vous n’êtes pas Amazon ou Cdiscount, certaines règles peuvent vous concerner en fonction de la taille et de la nature de votre site. Le DSA impose notamment aux sites concernés :

  • De prévoir un dispositif clair de signalement des contenus illicites (dont les produits contrefaits).
  • De coopérer avec les autorités compétentes en cas de demande.
  • D’assurer la transparence sur les vendeurs professionnels hébergés.

Le DSA ne remet pas en cause la distinction juridique entre hébergeur et éditeur, mais il renforce les obligations de vigilance pour tous les acteurs impliqués dans la diffusion de contenu ou de produits.

Ainsi, en tant qu’éditeur d’un site e-commerce, vous devez évaluer votre exposition au DSA en fonction de votre modèle d’activité. Si vous hébergez des vendeurs tiers ou du contenu généré par des utilisateurs, une mise en conformité peut être nécessaire. 

Comment sécuriser votre activité e-commerce face au risque de contrefaçon ?

La vente en ligne implique de multiples responsabilités juridiques, notamment en matière de propriété intellectuelle, de protection des consommateurs et de lutte contre la contrefaçon. Pour éviter tout litige ou sanction, certaines bonnes pratiques doivent être mises en place dès la création de votre site et maintenues dans la durée.

Choisissez des fournisseurs fiables et traçables

Se fournir à bas prix sur des plateformes internationales ou auprès de grossistes peu connus peut sembler attractif, mais cela comporte des risques majeurs. Un produit vendu à un prix compétitif peut très bien être une contrefaçon (ou ne pas respecter les normes applicables en Europe).

Avant toute mise en ligne, exigez des preuves concrètes de la légalité des produits que vous achetez :

  • Factures en bonne et due forme.
  • Certificats d’authenticité ou de distribution.
  • Documents attestant du respect des droits de propriété intellectuelle (licences, autorisations de revente).

Évitez les fournisseurs dont l’identité juridique est floue, ceux qui refusent de fournir des justificatifs et évidemment ceux qui proposent des produits imitant des marques connues. 

Encadrez strictement les vendeurs tiers sur votre site

Même si d’autres vendeurs proposent leurs produits sur votre site, vous pouvez être responsable, surtout si vous intervenez dans la présentation, la hiérarchisation ou la gestion des ventes.

Il est donc indispensable :

  • De mettre en place un contrat clair avec chaque vendeur tiers.
  • D’exiger des pièces justificatives d’identité et de statut professionnel.
  • De prévoir une clause de limitation de responsabilité dans vos Conditions Générales de Vente (CGV).

Préparez une procédure de retrait rapide et traçable

La LCEN impose, dès réception d’une notification conforme, le retrait prompt des contenus manifestement illicites. Mais au-delà de la loi, une réaction rapide vous permet de limiter votre exposition à des dommages-intérêts, voire à des sanctions pénales.

Pour cela :

  • Prévoyez sur votre site un formulaire ou une adresse e-mail dédiée au signalement des contenus litigieux (produits contrefaisants, atteintes à des droits, etc.).
  • Intégrez dans vos CGV une procédure claire de traitement des réclamations et de retrait des produits signalés.
  • Tenez à jour une preuve de vos actions (date de retrait, réponses envoyées, échanges avec le plaignant).

Plus votre démarche est structurée, plus vous démontrez votre bonne foi et votre sérieux.

Sécuriser vos CGV et vos mentions légales

Vos CGV, mentions légales et, le cas échéant, conditions d’utilisation sont vos premiers outils de protection en cas de litige.

Ces documents doivent être :

  • Adaptés à votre modèle économique (vente directe, dropshipping, place de marché…).
  • Conformes aux exigences légales en matière de protection du consommateur, de propriété intellectuelle et de responsabilité.
  • Rédigés de manière claire et précise.

En cas de procédure judiciaire, un texte mal formulé ou incomplet pourra jouer contre vous. À l’inverse, des CGV bien structurées permettent de délimiter vos responsabilités, de justifier vos pratiques et d’inspirer confiance à vos partenaires et vos clients.

C’est précisément pour vous aider à sécuriser ces fondations que le Bouclier 360 a été conçu. Ce service d’accompagnement juridique vous donne accès à des modèles de CGV et de contrats professionnels, pensés pour les e-commerçants et les entrepreneurs du digital. Mais ce n’est pas tout, vous bénéficiez aussi d’un accès illimité à une hotline juridique pour poser vos questions, valider une décision, débloquer une situation client ou éviter une erreur stratégique avant de signer un contrat. Vous devenez un client privilégié, avec une protection permanente et un traitement prioritaire de vos demandes. 

Souscrivez dès maintenant au Bouclier 360 et profitez d’un accompagnement juridique de pointe pour protéger et développer votre entreprise.

Derniers articles

S’il avait protégé son logo, ce web entrepreneur n’aurait pas perdu 200 000 euros ! Marc* est un web entrepreneur…

Le monde numérique est en perpétuelle mutation, et avec lui, la réglementation juridique évolue à un rythme effréné. Pour les…

Faire appel à des prestataires à l’étranger est devenu un réflexe pour bon nombre de web entrepreneurs. Développement web, création…